Depuis fin 2007, les Protestants des paroisses réformées de Marseille réfléchissent à l’échéance municipale.
Si dans la tradition de grande liberté du protestantisme français, il est hors de question de dicter son vote à qui que ce soit, il est naturel que le Chrétien s’interroge à la veille d‘une échéance politique majeure pour notre Cité.
La foi et les valeurs qui nous animent nous conduisent à porter un constat, à poser des questions sur Marseille et son devenir. Pour partager ces questionnements le Consistoire de l’Arc phocéen et le Comité protestant de veille civique Pro Cité ont adressé le 22 février 2008 sept questions des Protestants aux candidats des municipales 2008.
Chaque citoyen de notre cité est concerné et à ce titre se forge une opinion. Nos paroisses n’ont pas à se substituer à l’indispensable réflexion de chacun. Mais il est naturel que le Chrétien s’interroge à la veille d‘une échéance politique majeure pour notre Cité. La foi et les valeurs qui nous animent nous conduisent à porter un constat, à poser des questions sur Marseille et son devenir, sept constats et sept questions. Nous voulons partager ce qui dans notre métropole interpelle le Chrétien.
CONSTAT 1
La pauvreté touche plus d’un Marseillais sur huit (140 000 de nos concitoyens vivent en dessous du seuil de pauvreté). La capitale régionale a retrouvé les couleurs de la croissance, mais elle laisse un de ses enfants sur dix au moins au bord du chemin. Les jeunes sont en mal de repères pour tracer leur chemin de vie.
Comment remettre en mouvement, dans le respect de la personne et dans un parcours d’emploi, ceux qui en sont exclus ? Comment adopter une approche globale qui prenne en compte le surendettement, les déplacements, la garde des enfants, la complexité des problèmes tant familiaux que psychologiques ?
CONSTAT 2
Les relations entre les habitants de la ville se dégradent. Incivilités, incompréhension, replis, agressivité, mépris réciproque, indifférence. « L’ambiance » n’est pas toujours à la fête. Le risque est de passer du face-à-face à l’affrontement.
Comment remettre de la médiation, du respect, de l’autorité dans la Cité ? (L’autorité n’étant naturellement pas la figure de la menace ou de la répression, mais du respect ferme du bien commun et du vivre ensemble.) Comment créer des lieux, des médiateurs, des temps, des espaces de paroles ?
CONSTAT 3
Le pouvoir est devenu invisible, les responsables inatteignables, les décisions sont de plus en plus complexes. Personne ne sait plus à qui s’adresser pour résoudre les problèmes de la vie quotidienne.
Comment retrouver de la proximité et de la responsabilité dans une ville qui devient une société anonyme ? Comment identifier les leviers de changement, comment donner les clefs de la Cité aux citoyens ?
CONSTAT 4
Les personnes âgées vivent plus que d’autres une exclusion de la vie sociale. Souvent isolées, cantonnées dans des résidences fermées ou lointaines, elles participent peu à la vie sociale. Les services qui accompagnent la fin de vie sont encore embryonnaires et les lieux d’accueil peu accueillants.
Comment faire du troisième et quatrième âge un acteur de la cité ? Comment alors que nous gagnons trois mois d’espérance de vie par an, construire une ville de cohabitation des générations ? Comment construire du lien intergénérationnel, des actions, des lieux intergénérationnels ?
CONSTAT 5
Malgré les récentes inaugurations de transports en commun, le tram, souhaitable, la circulation dans la ville reste un cauchemar. Des quartiers entiers demeurent enclavés et ce sont toujours les plus démunis qui sont cloîtrés lorsque les transports collectifs font défaut. Plus grave la circulation, entre les quartiers eux-mêmes, est impossible, les transports sont monocentrés et ne favorisent pas la mobilité en particulier dans la recherche d’un emploi. Il est plus facile d’aller de Saint Antoine à Vitrolles que de Sainte Marthe à la Soude !
Comment créer une ville où l’on circule et où l’activité de tous profite à tous ?
CONSTAT 6
Le logement est pour les jeunes ménages, pour les sans-emploi un des drames de notre ville. Le renchérissement de l’immobilier a relancé la construction, mais la construction de logement est hors de portée des bourses moyennes et modestes. Marseille risque de connaître comme dans les années soixante un nouvel exode de ses forces vives. Le parc social ne joue plus son rôle, Marseille est au bord d’une fracture dans l’habitat et exclut une part de sa population du simple droit d’habiter la ville.
Comment maîtriser l’inflation immobilière et arrêter l’explosion des coûts ? Comment construire autrement, pour l’homme pour une vie de quartier, pour une meilleure relation entre habitants ? Comment offrir à nos jeunes actifs, aux milliers de demandeurs, un logement décent et accessible ?
CONSTAT 7
Les Marseillais ont du mal à s’accepter divers, différents, souvent « étrangers » de fraîche date. Entre la nostalgie d’une ville qui n’a jamais existé, celle d’un “entre nous” mythique, et la constitution de quartiers de l’entre-soi, il y a un autre modèle ou comme nous le dit la Bible, la figure de l’Autre est centrale et l’étranger notre commune destinée. « L’Autre n’est que l’Autre et pas un semblable ».
Comment construire une identité marseillaise commune au-delà des clichés ? Comment raconter une même histoire, celle d’une ville faite des migrations de tous les pays en conflit, celle des exilés du Nord et du Sud, celle des rencontres et des croisements ? Comment inscrire les histoires individuelles, familiales, communautaires dans une histoire commune ?