Vendredi 8 septembre 2016 l’Union pour les entreprises organisait son traditionnel Forum des entrepreneurs, le 16e sur le thème « Tous ensemble ou tous en guerre ? »
Christian Apothéloz, délégué général de Finances & conseil Méditerranée était invité comme intervenant aux côtés de Alain Cabras, François Gemenne, Hasni Abidi, Bernard Paranque et Aurore Sun sur le thème : « La Méditerranée Appellation d‘origine incontrôlée »
Quelle Méditerranée au XXIe siècle ? Méditerranée des villes ou des nations ? Les femmes sont-elles l’avenir de la Méditerranée ? Comment entre Orient et Occident recréer l’espace cohérent de coopération et oublier les divisions ? Faut-il encore croire en un destin collectif ?
Lors du débat animé par Frédéric Dubessy rédacteur en chef d’Econostrum, Christian Apothéloz a notamment développé les idées suivantes
La Méditerranée du XXI siècle paraît plus que compromise par les guerres larvées ou ouvertes à l’Est de la Méditerranée, par les frontières insurmontables par exemple entre Algérie et Maroc, par la montée de l’islamisme et du terrorisme.
Mais est-ce vraiment nouveau ?
Le passé de la Méditerranée n’a jamais été une terre de bonheur partagé, un lieu de cohabitation pacifique des trois monothéismes, un lac de paix.
Je suis engagé dans les échanges méditerranéens depuis la fin des années soixante-dix et j’ai toujours vu et déploré, un espace conflictuel, violent, déséquilibré… Faut-il rappeler les nombreux conflits qui ont marqué tant la rive nord que la rive sud, a‑t-on oublié Chypre ou l’ex Yougoslavie, les dictatures en Europe du Sud comme dans le monde arabe. L’écart de richesse de un a dix au détroit de Gibraltar et entre Israël et l’Égypte.
La Méditerranée est un espace rêvé, mais le rêve ne se réalise pas. Nous avons eu des périodes d’accalmie avec les accords d’Oslo en 1993, par exemple ou le Processus de Barcelone en 1995.
Le XXI siècle a commencé dans la douleur. L’espoir des printemps arabes démarré en Tunisie s’est ensablé avec le reflux des forces démocratiques et la montée des partis islamistes.
Mais la encore la nouveauté n’est que pour les amnésiques.
L’Algérie avait connu son printemps autour de 1990 et la première élection libre depuis 1962 avait porté les islamistes aux portes du pouvoir.
En 2000 nous avons connu le printemps de Damas et la déconvenue de voir que le fils Assad était à l’image du père.
En 2005, au Liban après l’assassinat de Rafic Hariri, le peuple libanais s’est mobilisé dans un mouvement inédit qui a débouché sur le départ des troupes syriennes stationnées dans le pays depuis 1976. On connaît la suite…
Par ce rappel je ne veux afficher ni pessimisme, ni optimisme.
Aujourd’hui, la Méditerranée déchirée est là, avec les réfugiés, le terrorisme, mais elle n’est pas plus ou moins avenante qu’hier.
À Marseille, dans notre région, nous ne pouvons détourner la tête.
La Méditerranée ici n’est pas une option, c’est une donnée. C’est comme une copropriété. On peut détester le barbecue du voisin d’en bas, ne pas supporter la voisine du second, on est obligé de payer les charges et d’emprunter le même escalier.
On peut penser à déménager. Mais pour une métropole c’est difficile, je nous vois mal en mer du Nord ou dans le Pacifique.
Ce que je veux dire, c’est que la géopolitique, comme l’économie font que nous devons gérer nos relations dans cet espace méditerranéen, nous devons échanger avec nos voisins, nous sommes redevables de ce couloir qui va de Suez à Gibraltar. Ceci que nous l’aimions ou pas !
Moi j’aime, d’autres moins, qu’importe ! Ce « destin collectif » n’est pas une question ou une réponse, c’est notre espace de vie, notre copro.
La meilleure façon de partager ce destin collectif, dans des temps troublés, est de faire confiance à la société civile. Toutes les tentatives pour établir des coopérations multilatérales par les Etats, toutes les initiatives qui ne reposent que sur les relations politiques sont volatiles. Nous sommes, bien sur, preneurs de bonnes relations bilatérales et multilatérales. Mais ce qui est solide et pérenne, ce qui produit de la valeur commune, ce sont les coopérations de la société civile.
Avec Finances & Conseil Méditerranée, nous avons établi des relations avec des professionnels du chiffre, du droit et de la finance, avec ceux que nous appelons nos “experts confiance”. Pour certains, comme Me Salir Hamouda à Alger ou M. Abdellatif Bernossi expert-comptable à Tanger les relations ont plus de dix années.
Cette relation longue, confiante, solide fait que lorsqu’une entreprise de la région nous demande d’intervenir sur le blocage d’un dossier, sur le règlement d’une créance, sur une question administrative, notre relais fonctionne avec une réactivité et une bienveillance exceptionnelle.
En mettant l’accent sur la société civile, femmes et hommes, et sur la relation humaine, nous prenons appui sur ce que nous savons faire le mieux en Méditerranée et à Marseille :
• Tisser des liens
• Faire vivre nos relations,
• Animer des réseaux de terrain.
C’est l’antique Méditerranée des marchands qu’il faut faire vivre.
En droit la “lex mercatoria” s’est imposée dans le commerce : plutôt que de confier leur sort à une autorité supérieure, les commerçants ont fondé des règles basées sur l’usage, c’est ce que nous retrouvons dans l’arbitrage et la médiation. C’est ce pragmatisme, des règles acceptées parce que fondées sur l’usage, qui pourrait inspirer positivement la Méditerranée du XXI siècle.