Le journaliste : déblog'notes

Provence-Alpes-Côte d’Azur : et si notre région allait bien !

par | 29 janvier 2009

La Diact, la Délégation inter­mi­nis­té­rielle à l’aménagement et à la com­pé­ti­ti­vi­té des ter­ri­toires, notre ex Datar vient de sor­tir une étude sur la dyna­mique et le déve­lop­pe­ment durable des ter­ri­toires en Europe. Dans la syn­thèse, (dis­po­nible ci-dessous) notre région se retrouve en bonne posi­tion.
Rappelons qu’il ne s’agit pas d’une ana­lyse conjonc­tu­relle et que tout lien avec la crise actuelle serait non ave­nu. Les ana­lyses s’appuient sur les évo­lu­tions des chiffres de 1999 à 2005.
Que découvre-t-on ?
D’abord au regard du PIB ? Le pro­duit inté­rieur brut, la France pro­duit plus que sa part dans la popu­la­tion euro­péenne : 15,6 % de la pro­duc­tion alors que nous ne repré­sen­tons que 12,8 % de la popu­la­tion.
À l’échelle des régions, Paca se situe au 15° rang, Île de France en pre­mier devant Londres ou la Lombardie, Rhône Alpes est 7°, mais la pre­mière région fran­çaise après Paca, le Nord, est loin au 24° rang.
Bon pal­ma­rès donc avec une autre bonne nou­velle, c’est que ce clas­se­ment est le résul­tat d’une dyna­mique posi­tive, nous sommes, par­mi les 50 plus grandes régions euro­péennes une de celles qui affichent une dyna­mique des plus vives, (plus de 2 % de crois­sance du PIB) alors que les autres régions fran­çaises qui nous devancent ont un rythme plus alan­gui de pro­gres­sion.
Notre région s’inscrit ain­si dans un bas­cu­le­ment de la géo­gra­phie éco­no­mique fran­çaise : les régions de l’Ouest et du Sud prennent le lea­der­ship du déve­lop­pe­ment tan­dis que les anciennes régions indus­trielles, le Nord et l’Est souffrent de recon­ver­sions inache­vées et dou­lou­reuses.
Croissance du PIB qui est cor­ro­bo­rée avec une nata­li­té vigou­reuse. Provence Alpes Côte d’Azur compte plus d’un mil­lion de jeunes de moins de 20 ans, elle fait par­tie des quatre régions fran­çaises « mil­lion­naires » en jeunes avec Île de France, Rhône-Alpes et Nord.
Paca affiche un PIB tonique. Elle est clas­sée deuxième de France pour le PIB par habi­tant. Mais ceci explique cela, elle est la pre­mière en PIB par emploi. Donc, hors Paris Paca est la région où chaque sala­rié en acti­vi­té créée le plus de valeur en France.
Notre crois­sance est donc soli­de­ment ancrée sur la jeu­nesse et l’intelligence.
Ce sont les fruits d’une longue muta­tion.
Au risque d’être poli­ti­que­ment incor­rect, j’y vois natu­rel­le­ment le tro­pisme des régions lit­té­rales et l’attractivité pour l’industrie des régions tou­ris­tiques. Mais aus­si des poli­tiques régio­nales qui ont appuyé dans le bon sens.
Il y eut trois étapes
L’âge des pion­niers. Lorsque la région n’est qu’un éta­blis­se­ment public régio­nal, que Gaston Defferre, puis Michel Pezet sont à la pré­si­dence, des acteurs autour de Philippe Langevin nous font décou­vrir l’espace régio­nal. On en connaît à peine les contours, l’économie est une boîte noire et l’on découvre peu à peu ses points forts : sa recherche, la nou­veau­té de son déve­lop­pe­ment éco­no­mique, le tou­risme, sa façade médi­ter­ra­néenne et ses richesses alpines. On pense alors plus à son « désen­cla­ve­ment » sans per­ce­voir que ce sera l’économie numé­rique qui va désen­cla­ver la région et pas les tun­nels ou les auto­routes.
La seconde étape déci­sive est le lan­ce­ment de la Route des hautes tech­no­lo­gies en 1986 par le conseiller régio­nal en charge de l’économie sous Jean Claude Gaudin, Jean Louis Geiger. Ce concept tota­le­ment construit s’inspire des USA, sur le modèle de la route « 128 » de Boston, mais il a le mérite, toutes pro­por­tions gar­dées, de don­ner un coup de pro­jec­teur sur des pôles en ges­ta­tion et de les accro­cher à une loco­mo­tive tech­no­lo­gique et média­tique connue Sophia Antipolis. Cette route fait que les acteurs de l’Est et de l’Ouest, dépas­sant à muraille de l’Estérel, se parlent et com­mencent à construire une iden­ti­té éco­no­mique régio­nale. Parallèlement le conseil régio­nal lance une cam­pagne de com­mu­ni­ca­tion qui prend à rebrousse-poil les exé­gètes du ter­ri­toire. PACA pro­clame alors « L’avenir gagne le sud » et le publi­ci­taire de génie, Gérard Gineste, qui inven­ta ce slo­gan dis­tri­bue aux jour­na­listes une bous­sole qui indique le Sud ! Nous sommes alors en plein « déses­poir ter­ri­to­rial » : l’image de l’Europe est celle de la banane bleue, la dor­sale euro­péenne ou méga­lo­pole euro­péenne qui évite soi­gneu­se­ment notre région. Les flux et les richesses révé­lés par Roger Brunet tra­versent l’Europe du Lancashire à la Toscane. La région PACA est hors jeu et même lorsque l’on inclut une mini-banane vers Barcelone, elle part de Lyon et nous laisse un tri­angle voué au tou­risme et au désert indus­triel.
Cette com­mu­ni­ca­tion volon­ta­riste était en fait anti­ci­pa­trice puisque la nou­velle carte des richesses natio­nales des­sine un arc de déve­lop­pe­ment sur les régions lit­to­rales médi­ter­ra­néenne et atlan­tique.
La troi­sième étape est contem­po­raine, elle est celle où nos ins­ti­tu­tions recon­naissent la valeur du ser­vice et du ser­vice à valeur ajou­tée et sur­tout mettent en place à tra­vers le Schéma régio­nal de déve­lop­pe­ment éco­no­mique adop­té à l’unanimité des conseillers régio­naux en juin 2006. Certes le sché­ma démarre après 2005 et ne peut donc être à l’origine des bons chiffres 99–2005, mais il intègre les fac­teurs de déve­lop­pe­ment de cette nou­velle éco­no­mie régio­nale et lui donne des moyens : inno­va­tion, tra­vail en clus­ter, ouver­ture sur la Méditerranée et for­ma­tion.
Pour autant tout va-t-il au mieux ?
L’analyse de la DIACT per­met de dis­cer­ner trois points de défaillances.

  1. Tout d’abord notre inves­tis­se­ment dans la recherche est encore trop faible. La France et l’Europe sont autour de 2 %, les USA à 2,7, le Japon à 3,2. PACA est dans la moyenne fran­çaise, mais Rhône-Alpes fait le double avec 4,1 de son PIB dans les labos !
  2. Une cohé­sion sociale fra­gile. L’écart des reve­nus dans la métro­pole régio­nale est des plus éle­vés et il y a comme on dit dans le jar­gon, des « poches de pré­ca­ri­té » avec une exclu­sion durable du mar­ché du tra­vail, des zones de pau­vre­té en par­ti­cu­lier dans la région mar­seillaise. Pour résu­mer : ceux qui tra­vaillent ont une forte pro­duc­ti­vi­té et des bons salaires, mais ceux qui sont exclus le sont dura­ble­ment. C’est intenable.
  3. Enfin l’artificialisation du ter­ri­toire, (en gros le béton­nage et gou­dron­nage), source de chan­ge­ments cli­ma­tiques, est des plus forte sur toute la zone côtière et péri­ur­baine. Nous sommes là mal­heu­reu­se­ment dans le pelo­ton de tête des mau­vais élèves. Les lois Littoral et Montagne pro­tègent un peu, mais sont encore l’objet d’attaques et d’entorses per­ma­nentes, il est temps non seule­ment de les appli­quer fer­me­ment mais de s’interroger sur leur adé­qua­tion à la nou­velle donne climatique.

Christian Apothéloz