Article paru dans le Nouvel Économiste.
Marseille, indépendance ! C’est ce slogan qu’un millier de jeunes supporters de l’OM, black, blancs, beurs, ont scandé en manifestant sur la Canebière contre l’injure faite à leur club. On veut nous prendre notre victoire, haranguait en termes plus fleuris le leader des “ultras”, Paris, la Justice, la Presse, la France nous attaquent : indépendance ! Dérision. “Fier de Tapie, fier de l’Om, fier de Marseille”, le patriotisme marseillais joue à fond. quelles que soient les responsabilités des patrons et des joueurs du club, la ville a vécu la descente des Valenciennois comme un déchirement. Marseille, pendant quelques semaines, depuis le but de Basile Boli, s’était enfin sentie aimée de son pays. Reconnue, réconciliée. Lorsque la vague de l’hostilité revient, la tentation insulaire l’emporte.
Henry Roux-Alezais, président de la chambre de commerce, sur le plan de l’aménagement ne fait pas un constat différent. Revendiquant une plus grande “continuité territoriale” avec l’Europe, il déplore que l’on se soit refusé à mettre 17 milliards pour finir Rhin-Rhône, que les percées alpines entre Italie et France n’avancent pas et que le TGV reste en panne à Valence. Marseille n’existe en effet que comme interface nord sud et retrouve sa géostratégie naturelle. Ce que le commerce méditerranéen lui a donné hier, elle le recherche dans une nouvelle politique méditerranéenne, volontariste et multiple. La semaine dernière, le Palais du Pharo, accueillait les rencontres de l’Institut méditerranéen de l’eau sur le thème de la gestion des eaux usées avec des décideurs maghrébins et français de l’hydraulique. Sid Ahmed Ghozali, ancien ministre, ambassadeur d’Algérie en est à sa seconde visite en quinze jours dans la région : la première à l’invitation de la chambre de commerce pour rencontrer les exportateurs, la seconde pour un colloque organisé à Aubagne par « Confrontations » sur la coopération décentralisée en Méditerranée.
Coopération qui était au centre de la Première journée du partenariat interentreprises en Méditerranée organisée par l’Adeci, l’association régionale pour la coopération industrielle internationale animée par Francis Testa. Jean-Claude Gaudin y a confirmé l’engagement de Provence Alpes Côte d’Azur dans une politique d’échanges soutenus avec la Catalogne, le Languedoc-Roussillon, le Maroc et la Tunisie qui doit déboucher en novembre prochain sur la signature en Avignon d’une Charte du bassin méditerranéen. Il retrouve ainsi une stratégie méditerranéenne que son prédécesseur Michel Pezet avait initiée de 1981 à 1986, politique mise en veilleuse pour cause d’alliance avec le Front national. Issu de cette période, l’Orchestre des jeunes de la Méditerranée fêtera ses dix ans cette année avec une tournée au Maroc, à l’invitation personnelle du roi Hassan II. Mais c’est du côté des entreprises que la prise de conscience est la plus forte. Lors de la journée de l’Adeci, la toute petite entreprise des Papeteries de Gromelle, de Saint-Saturnin les Avignon a par exemple montré comment à partir d’un contact technique, la PMI provençale s’est ouvert des marchés d’export. “Nous sommes sur la même longueur d’onde que nos interlocuteurs marocains et nous avons une volonté réciproque de collaborer”, note Jacques Ducrès, directeur. “Nous ne pouvons laisser les pays du Maghreb sombrer, confirme Druon Note, Pdg des laboratoires Laphal. C’est l’intérêt de l’Europe, c’est aussi celui de nos entreprises. C’est un choix de raison et un choix affectif, souligne ce patron pied noir”.
Christian Apothéloz