Paru dans le magazine mensuel régional protestant Échanges
Chaque dimanche, journaliste de la locale de Marseille, il a trois colonnes pour parler religions dans le quotidien de régional, La Provence. Un rendez-vous ouvert à toutes les confessions, avec un regard tolérant et exigeant.
Comment est née cette rubrique dominicale ?
Nous nous sommes rendu compte, en 94, avec mon chef de service, que nous n’étions pas présents journalistiquement sur la thématique religieuse : pas de rubrique régulière, pas de journaliste motivé, donc un traitement aléatoire des sujets, sans suivi réel. Or dans une ville comme Marseille, les sujets communautaires et religieux ont un relief particulier. Nous avons eu, je crois une réaction de journaliste.
Et cette rubrique est confiée à un homme de religion ?
Non, je suis plutôt agnostique, je n’ai pas de grandes certitudes. J’ai reçu une éducation catholique, j’ai milité au Mouvement rural de la jeunesse chrétienne, puis à l’Action catholique des enfants. Puis j’ai bossé avec la Cimade… J’ai trouvé des gens bien qui au nom de leur foi ont un engagement extraordinaire auprès des autres.
C’est le philosophe qui ressort sous le journaliste…
La philosophie pose la question du sens de la vie. Cette rubrique est un des rares lieux où l’on pose ces questions essentielles, c’est une prise de parole contre le conformisme ambiant. Il y a par exemple à Marseille un réseau d’aide aux gens en grandes difficultés, animé par des hommes et des femmes de foi. Nous avons un espace privilégié pour parler d’eux.
Comment pouvez-vous arbitrer entre les nombreux courants religieux ?
Je n’ai pas à arbitrer, mais je suis journaliste, je garde en toute chose mon regard critique. Par exemple, lorsque l’Opus dei organise une manifestation à Marseille, j’en parle, parce que c’est un événement, mais avec esprit critique. Ce journal est vendu à 100 000 exemplaires le dimanche, j’ai une responsabilité.
Comment se repérer dans ce maquis des “religions” de la cité phocéenne ?
J’ai deux ou trois référents dans chaque confession qui m’aident à y voir clair. Je suis par exemple harcelé par les témoins de Jéhovah. Je n’ai pas à écrire contre ma conscience. Et j’ai toujours eu carte blanche de la direction.
C’est bien compris ?
Ce n’est pas toujours compris et il m’arrive qu’un pasteur, un prêtre, un rabbin ou un imam me batte froid après un article. Mais, c’est mon métier. Je ne veux pas que ma rubrique ne soit lue que par les culs bénis. Ce n’est pas un bulletin paroissial. J’ai un rôle de passeur, la tolérance, ça s’apprend.
Vous êtes devenu un spécialiste des religions…
Je ne veux être spécialiste de rien, je suis journaliste d’abord. Parler de religion relève de la conscience personnelle, et le fait de ne pas être affilié à une église me donne une grande liberté. Et je traite bien d’autres sujets dans les colonnes du journal.
Est-ce que la place de la religion a changé dans le journal ?
Oui, la religion n’est pas sanctuarisée dans ma rubrique. Ce travail débouche sur une capacité à mieux traiter de vrais débats comme celui de la mosquée ou des sujets passionnants comme le patrimoine des églises de la ville.
Est-ce significatif d’une place nouvelle du religieux dans la ville ?
Le journal se fait l’écho de ce qui se fait dans la cité. J’ai le sentiment que Marseille n’est pas une ville très pratiquante, mais que les communautés sont fières de leur identité et donc de leur appartenance religieuse. Sans pour autant que nous ayons des religions ghetto.
Christian Apothéloz
La présence protestante française héritage de l’Allemagne
Avant le mandat français, les Allemands avaient une mission protestante, un jardin d’enfant, une église et un petit dispensaire. Après la guerre de 14/18 les biens allemands ont été confisqués, et il fallait trouver des organismes correspondants français. Le jardin d’enfant est devenu le Collège protestant, l’église, elle a été prise en charge par les aumôniers protestants de l’armée française. La maison du pasteur fut échangée contre un terrain où l’on a construit le temple et le presbytère.