Le bouillonnant Michel Kester nous a quitté et la période oubliée dans les nécrologies publiques est celle que nous avons partagée en 1986–1987.
Fidèle de Michel Pezet, ingénieur de la Générale des eaux, ancien directeur de la Région, il avait accepté de présider ce projet de presse marseillais qu’était l’Hebdomadaire. Michel Pezet qui visait la mairie avec pugnacité, voulait desserrer le carcan du Provençal d’où Edmonde Charles Roux le bombardait quotidiennement, notamment avec des articles d’un certain Jean-Pierre Chanal !
Jean Noël Tassez était au commande d’un média qui n’eut pas le temps de trouver son public.Jean-Noël Tassez (1956–2015) fraîchement sorti de la Marseillaise dirigeait la rédaction, et était préposé aux dépenses, il était expert, Michel Kester avait été placé là pour les limiter. Le canard était novateur en quatre cahiers avec des journalistes comme Dominique Pons, Hervé Nedelec, Karine Oswald, Jean-Louis Marcos, Jacques Corot ou Pape Diouf, des anciens de la Marseillaise qui poursuivrons leur chemin ailleurs.
J’avais été recruté, tardivement, après le numéro zéro, pour prendre en main le cahier Business, et j’y opérais avec Anne-Françoise Robert, Xavier Sourice, Julie Gence et en image Jean-Yves Delattre.
C’était une ruche, au 89 la Canebière (siège aujourd’hui de Boréal Innovation) avec une entreprise de 40 salariés. Nous élaborions un média décapant, avec une maquette léchée conçue pat Thierry Othnin-Girard et des processus de fabrication totalement inédits pour l’époque.
Las, si l’argent semblait couler à flots, on sut bien plus tard que l’origine était douteuse et l’enveloppe limitée. Le journal coûtait un million de francs par semaine ! Au bout de dix semaines, il fallut, à la veille de l’été, en juin 1987 fermer boutique. Et donc licencier les 40 salariés dont certains avaient largué un job, sans filet de secours.
Les équipes me désignèrent dans cette procédure de liquidation estivale comme représentant des salariés et je passai des semaines donc, avec le mandataire social, le PDG, Michel Kester pour régler au mieux la fin de ce rêve de média. Michel Pezet nous avait oubliés, Michel Kester fut un partenaire attentif, humain et drôle. Seuls dans les locaux du 83, nous fîmes au mieux…
Une complicité était née et lorsque je lançai en 1993, la lettre Sud Infos, il m’ouvrit la porte de ce qui deviendrait sous son impulsion les Docks de la Joliette. Toujours réservé, toujours fumeur, il poursuivit son chemin dans l’immobilier à Nexity, puis il prit en main les destinées de la Safim.
À l’annonce du décès de Michel Kester, le maire de Marseille réagit via un communiqué : « C’est avec une très vive émotion que j’apprends le décès de Michel Kester pour lequel j’avais une grande estime. Je suis profondément affecté par la disparition de cet ami qui a œuvré toute sa vie pour le rayonnement de notre ville. Michel était un formidable meneur d’hommes et un ingénieur brillant qui a largement contribué à l’organisation des services de la Région en assurant la direction générale dès 1983. En faisant toujours preuve d’humilité et de sagesse, Michel Kester s’est ensuite tourné vers le monde de l’immobilier en lançant notamment à la fin des années 1980 la réhabilitation des Docks. Il a ensuite pris la présidence du groupe Nexity Georges V Provence en 1993. Michel est, sans aucun doute, l’un des grands acteurs de la transformation de l’actuel quartier Euroméditerranée. Prédécesseur de Loïc Fauchon, son engagement à la tête de la Safim de 1997 à 2013 a permis à Marseille de devenir une place centrale des séminaires internationaux et d’organiser chaque année une Foire Internationale de premier plan. Mes plus chères pensées et mes condoléances vont à sa famille et ses proches. »