Le journaliste : portraits

Michel Kester, éphémère patron de presse

par | 30 mai 2020

Le bouillon­nant Michel Kester nous a quit­té et la période oubliée dans les nécro­lo­gies publiques est celle que nous avons par­ta­gée en 1986–1987.

Fidèle de Michel Pezet, ingé­nieur de la Générale des eaux, ancien direc­teur de la Région, il avait accep­té de pré­si­der ce pro­jet de presse mar­seillais qu’était l’Hebdomadaire. Michel Pezet qui visait la mai­rie avec pug­na­ci­té, vou­lait des­ser­rer le car­can du Provençal d’où Edmonde Charles Roux le bom­bar­dait quo­ti­dien­ne­ment, notam­ment avec des articles d’un cer­tain Jean-Pierre Chanal !

journal l hebdomaire marseille 1987 tassez
Jean Noël Tassez était au com­mande d’un média qui n’eut pas le temps de trou­ver son public.

Jean Noël Tassez était au com­mande d’un média qui n’eut pas le temps de trou­ver son public.Jean-Noël Tassez (1956–2015) fraî­che­ment sor­ti de la Marseillaise diri­geait la rédac­tion, et était pré­po­sé aux dépenses, il était expert, Michel Kester avait été pla­cé là pour les limi­ter. Le canard était nova­teur en quatre cahiers avec des jour­na­listes comme Dominique Pons, Hervé Nedelec, Karine Oswald, Jean-Louis Marcos, Jacques Corot ou Pape Diouf, des anciens de la Marseillaise qui pour­sui­vrons leur che­min ailleurs.

J’avais été recru­té, tar­di­ve­ment, après le numé­ro zéro, pour prendre en main le cahier Business, et j’y opé­rais avec Anne-Françoise Robert, Xavier Sourice, Julie Gence et en image Jean-Yves Delattre.

C’était une ruche, au 89 la Canebière (siège aujourd’hui de Boréal Innovation) avec une entre­prise de 40 sala­riés. Nous éla­bo­rions un média déca­pant, avec une maquette léchée conçue pat Thierry Othnin-Girard et des pro­ces­sus de fabri­ca­tion tota­le­ment inédits pour l’époque.

Las, si l’argent sem­blait cou­ler à flots, on sut bien plus tard que l’origine était dou­teuse et l’enveloppe limi­tée. Le jour­nal coû­tait un mil­lion de francs par semaine ! Au bout de dix semaines, il fal­lut, à la veille de l’été, en juin 1987 fer­mer bou­tique. Et donc licen­cier les 40 sala­riés dont cer­tains avaient lar­gué un job, sans filet de secours.

Les équipes me dési­gnèrent dans cette pro­cé­dure de liqui­da­tion esti­vale comme repré­sen­tant des sala­riés et je pas­sai des semaines donc, avec le man­da­taire social, le PDG, Michel Kester pour régler au mieux la fin de ce rêve de média. Michel Pezet nous avait oubliés, Michel Kester fut un par­te­naire atten­tif, humain et drôle. Seuls dans les locaux du 83, nous fîmes au mieux…

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La salle de rédac­tion de l’Hebdomadaire au 89 La Canebière on retrouve Hervé Nédélec et on devine Pape Diouf.

Une com­pli­ci­té était née et lorsque je lan­çai en 1993, la lettre Sud Infos, il m’ouvrit la porte de ce qui devien­drait sous son impul­sion les Docks de la Joliette. Toujours réser­vé, tou­jours fumeur, il pour­sui­vit son che­min dans l’immobilier à Nexity, puis il prit en main les des­ti­nées de la Safim.


À l’annonce du décès de Michel Kester, le maire de Marseille réagit via un com­mu­ni­qué : « C’est avec une très vive émo­tion que j’apprends le décès de Michel Kester pour lequel j’avais une grande estime. Je suis pro­fon­dé­ment affec­té par la dis­pa­ri­tion de cet ami qui a œuvré toute sa vie pour le rayon­ne­ment de notre ville. Michel était un for­mi­dable meneur d’hommes et un ingé­nieur brillant qui a lar­ge­ment contri­bué à l’organisation des ser­vices de la Région en assu­rant la direc­tion géné­rale dès 1983. En fai­sant tou­jours preuve d’humilité et de sagesse, Michel Kester s’est ensuite tour­né vers le monde de l’immobilier en lan­çant notam­ment à la fin des années 1980 la réha­bi­li­ta­tion des Docks. Il a ensuite pris la pré­si­dence du groupe Nexity Georges V Provence en 1993. Michel est, sans aucun doute, l’un des grands acteurs de la trans­for­ma­tion de l’actuel quar­tier Euroméditerranée. Prédécesseur de Loïc Fauchon, son enga­ge­ment à la tête de la Safim de 1997 à 2013 a per­mis à Marseille de deve­nir une place cen­trale des sémi­naires inter­na­tio­naux et d’organiser chaque année une Foire Internationale de pre­mier plan. Mes plus chères pen­sées et mes condo­léances vont à sa famille et ses proches. »